1954
– Le Miracle de Berne – Das Wunder von Bern
Canzone française – Le Miracle de Berne – Das Wunder von Bern – Marco Valdo M.I. – 2011
Histoires d'Allemagne 55
An
de Grass : 54
Au travers du kaléidoscope de Günter Grass. : « Mon Siècle » (Mein Jahrhundert, publié à Göttingen en 1999 –
l'édition française au Seuil à Paris en 1999 également) et de ses traducteurs français : Claude Porcell et Bernard Lortholary.
Au travers du kaléidoscope de Günter Grass. : « Mon Siècle » (Mein Jahrhundert, publié à Göttingen en 1999 –
l'édition française au Seuil à Paris en 1999 également) et de ses traducteurs français : Claude Porcell et Bernard Lortholary.
Mil
neuf cent cinquante-quatre, nous voici en mil neuf cent
cinquante-quatre, comme le temps passe, mon ami Lucien l'âne...
Dis-donc,
Marco Valdo M.I. mon ami, il y avait bien longtemps que tu nous avais
présenté une de tes Histoires d'Allemagne, je me demandais ce qui
se passait... Si tu n'avais pas abandonné ton projet de faire les
cent chansons, comme tu l'avais dit, sur les cent textes de Günter
Grass, racontant cent ans de l'Histoire de l'Allemagne. Et voilà
soudain que tu te mets à vouloir chanter un miracle ? Je vois bien
au titre en allemand que c'est sûrement une histoire d'Allemagne,
mais encore ? Te voilà confit en dévotion et pour quelle sainte ?
Songes-tu à Marie ? Songes-tu à Madeleine ?
Ah,
mon ami Lucien l'âne, il n'est pas du tout question de religion, ni
d'honorer une sainte, fût-elle Marie, fût-elle Madeleine, femme
expérimentée, qui, si j'en crois l'Évangile selon Jésus, épousa
le Nazaréen et lui fit beaucoup d'enfants... Mais une fois n'est pas
coutume, si tu le veux bien, je te chanterai un moment
particulièrement palpitant de l'épopée du football... Car il est
ainsi le rôle des aèdes qu'il leur revient de chanter les grands
moments des épopées... Et tu admettras qu'il n'est pas plus idiot
de chanter le Miracle de Berne que la Guerre de Troie, de relater la
confrontation entre les onze valeureux Hongrois et les onze Allemands
trop exaltés que le massacre d'Hector par Achille. Et tu verras que
cette histoire ne manque pas de surprendre, même un âne futé comme
toi...
Parce
que tu crois que je ne ne sais pas déjà que ce « miracle de Berne
– Wunder von Bern » tient au fait de la victoire de l'Allemagne,
pour la première fois, en finale d'une Coupe du Monde de football ou
d'un championnat du monde... Pour moi, c'est du pareil au même. Je
perçois très bien pourquoi on a parlé – en Allemagne – de
miracle... Mais quel saint ou quelle sainte était derrière cette
victoire-là ?
Avant
de te répondre à cette question... Laisse-moi un peu plus te donner
les dimensions de l'épopée... D'abord, nous sommes en 1954...
L'Allemagne est brisée en deux, le monde aussi, d'ailleurs. Et comme
cela éclatera en fanfare à la fin du match, elle – du moins,
cette demi-Allemagne, dite de l'Ouest, du moins, ceux de ses
habitants qui ont suivi ce match – laisse percer un « Deutschland
über alles »... « über alles in der Welt » du plus bel effet...
Maintenant, je vais te donner le nom de la sainte qui est intervenue,
pour – tels les dieux et les déesses antiques – soutenir ses
héros et leur faire vaincre en ce duel aux dimensions mondiales. Il
s'agit tout simplement de Sainte Pharmacie, qui leur délivra au
moment du combat de saintes piqûres d'amphétamines. Les mêmes qui
avaient servi à maintenir éveillés les pilotes de la Luftwaffe et
les tankistes de la SS. Je te passe les autres combines qui ont
permis cette étrange victoire...
Il
y aurait donc eu du dopage et d'autres combines du côté de l'équipe
allemande ???, dit Lucien l'âne interloqué...
Tout
à fait. Et ce n'est pas une élucubration de journaliste en mal de
copie... Ainsi, le jour-même, dès après le match, Puskas – le
capitaine de l'équipe de Hongrie – dénonça cette tricherie en
disant que les joueurs allemands avaient « la bave aux lèvres ».
Et voilà maintenant qu'une récente étude allemande, du Comité
Olympique allemand, sur le dopage dans les sports en Allemagne,
indique qu'en effet, l'équipe qui gagna à Berne avait été
dopée... Il paraît qu'on avait dit aux joueurs que ces « piqûres
» contenaient de la vitamine C.... quand en réalité, comme je l'ai
dit, elles contenaient de la « pervitine », une sorte
d'amphétamine.
Et
quelle autre perfidie, quelle autre traîtrise a-t-on encore commise
?, dit Lucien l'âne en baissant ses noires oreilles en signe de
désapprobation.
Il
n'est pas dans mes habitudes de rapporter des cancans, ni de mettre
en doute la correction d'un arbitre, surtout quand il est anglais...
mais, ce jour-là, l'arbitre annula purement et simplement le but
d'égalisation des Hongrois à quelques instants de la fin du
match... Ce qui l'aurait prolongé... Cela malgré les protestations
de Puskas qui savait très bien ce qu'il en était de son but... et
curieusement, tu le noteras, si l'on a conservé le film de tout le
match – un des premiers retransmis à la télévision – on ne
retrouve plus les bobines qui enregistrèrent cette phase de jeu...
Que révélaient-elles ces bobines ? Autre fait étrange, j'en
reviens aux amphétamines, toute l'équipe allemande a souffert d'une
épidémie soudaine de jaunisse dans les jours qui suivirent ce
match...
Mais
si cela est vrai et ce doit l'être, il faudrait rendre aux Hongrois
le trophée de ce combat... Il y a là comme une règle morale, une
règle de décence qui devrait être sans réserve appliquée... Même
dans le sport... Même dans le sport, ce monde est atteint de la
folie des grandeurs, de cette maladie de l'avidité, de la volonté
de domination... à n'importe quel prix. Vois-tu, je n'aime pas plus
les tricheurs que les exploiteurs...
Enfin,
je te rappelle, si la chose t'avait échappé, que la Hongrie – à
l'époque – était un pays qu'on disait socialiste ou
communiste... Elle ne pouvait pas gagner cette compétition au moment
où s'étendait cette guerre froide... Donc cette entorse aux règles
de la bienséance et de la décence, bref, cette gigantesque
tricherie, cette kolossale tromperie arrangeait beaucoup de monde.
En
somme, dit Lucien l'âne en raclant le sol de son sabot droit, c'est
un épisode de cette Guerre de Cent Mille Ans que les riches font aux
pauvres pour assurer dans les siècles des siècles leurs richesses,
renforcer leur domination, développer leurs pouvoirs et étendre
infiniment leurs profits... Eh bien, tu vois encore une fois, Marco
Valdo M.I. mon ami, toutes les raisons qu'il y a de tisser le linceul
de ce vieux monde tricheur, sournois, dopé et cacochyme
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.
Le
Walter Elf, le Onze de Walter
Walter
le Rote Jäger
Contre
le Onze en Or,
Il
y allait avoir du sport
Moi,
je n'étais pas à Berne
J'espérais
de ma chambre
Das
Wunder von Bern
Il
faut nous comprendre
À
Munich, dans ma chambre
Soudain
debout, j'ai chanté
Über
alles in der Welt.
Quand
le miracle est arrivé.
Über
alles in der Welt.
Soudain
debout, on a tous chanté
D'un
côté, une équipe de brillants joueurs
Magyars
dans l'âme et trente et une fois vainqueurs
Puskas,
déjà blessé par les Allemands
Sur
une jambe égalise au dernier moment
L'épopée
éclate en fanfare
Un
but enchanté comme un air tzigane du lac Balaton
L'arbitre
anglais, oublions son nom !
Laissa
blesser Puskas et annula le but hongrois
On
ne trouve plus le film de ce but-là.
De
l'autre côté, l'équipe d'un demi-État
Ce
n'étaient pas des vitamines
Ces
injections de pervitine
Ces
piqûres dans les bras.
La
jaunisse prolongea la victoire.
Une
kolossale tricherie
Pour
toujours, l'étoile est ternie
Ce
trophée qu'ils ne méritent pas
Le
rendront-ils un jour aux valeureux Hongrois ?
Moi,
j'aurais bien voulu les associer
Fritz
et Ferenc, ces deux-là
Les
deux gloires des camps opposés
Cinéma
et salchicha
Saucisse
et blanc pétillant,
Loto
et restaurant,
Mais
ces deux têtus
N'en
ont pas voulu.
D'un
côté, Fritz Walter, exploitant d'un cinéma
Flanqué
d'un bureau de loto
Dans
la ville du Poisson Au Repos
La
Cité impériale, le cœur du Palatinat
327
buts chez les Roten Teufel de Kaiserslautern,
Et
son Fritz-Walter-Stadion, à présent à Kaiserslautern.
De
l'autre, Ferenc Puskas, le major galopant
Extérieur
gauche d'Hondved Budapest,
Sans
boulot, après Bilbao
Marchand
de saucisses à Madrid
Pancho,
le pansu avait pris trente kilos
Un
fiasco les Puskas salchichas,
Cañoncito
Pum Pum, lo zurdo,
Et
chez lui, bien plus tard, dans l'Est,
Son
Stade Ferenc Puskás à Budapest
Le
Walter Elf, le Onze de Walter
Walter
le Rote Jäger
Contre
le Onze en Or,
Il
y allait avoir du sport
Moi,
je n'étais pas à Berne
J'espérais
de ma chambre
Das
Wunder von Bern
Il
faut nous comprendre
À
Munich, dans ma chambre
Soudain
debout, j'ai chanté
Über
alles in der Welt.
Quand
le miracle est arrivé.
Über
alles in der Welt.
Soudain
debout, on a tous chanté
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