1914
– Boue, bombe, bruit et brouillard
Canzone
française – Boue, bombe, bruit et brouillard – 1914 – Marco
Valdo M.I. – 2011
Histoires
d'Allemagne 15
An
de Grass : 14
Au
travers du kaléidoscope de Günter Grass. : « Mon Siècle » (Mein
Jahrhundert, publié à Göttingen en 1999 – l'édition française
au Seuil à Paris en 1999 également) et de ses traducteurs français
: Claude Porcell et Bernard Lortholary.
Ah,
Lucien l'âne mon ami, je suis content de te voir. Je m'inquiétais
un peu de ton retard. Surtout qu'il y a du brouillard…
Ne
t'en fais pas comme ça, Marco Valdo M.I. mon ami, nous les ânes, on
avance à petits pas, mais on a de bons et grands yeux. Le
brouillard, ni le sol humide ne nous font peur. Mais dis-moi, mon ami
au grand cœur, qu'as-tu à me faire voir ce jourd'hui ?
Voir
ou entendre... Ah, Lucien mon ami, j'étais tout spécialement
anxieux de te voir venir, car la canzone du jour est vraiment peu
ordinaire et je me réjouissais de te la faire connaître. Elle
raconte une entrevue entre deux grands écrivains allemands qui
doivent leur célébrité à leur roman sur la Grande Guerre, ainsi
qu'on l'appelle dans les livres d'histoire et dans les journaux.
Cela
me semble bien intéressant, mais écoutons la suite.
En
fait, ce sont deux romans qui racontent les années folles de la
guerre que lança Guillaume, tu sais bien : celui qui dessinait des
bateaux. Celle de 1914-1918. Deux romans et romanciers allemands qui
se situent aux extrémités du spectre pacifiste – militariste.
L'un est résolument opposé à la guerre, c'est « À l'Ouest, rien
de nouveau », l'auteur est Erich Maria Remarque. L’autre est
plutôt franchement polémophile, il a tout du guerrier, c'est «
Orages d'acier », l'auteur est Ernst Jünger.
Que
voilà bien une confrontation des plus extraordinaires. Où et quand
a-t-elle eu lieu ?
D'abord,
un dernier mot à propos de la canzone et de son contenu. Pour nous
de langue et de culture françaises, cette confrontation apporte une
autre façon de voir le monde, un point de vue de l'autre côté.
Et
alors, dit Lucien l'âne interloqué...
Alors,
c'est surprenant, on a l'impression de voir dans un miroir. Dorgelès,
Barbusse... racontaient une même histoire, mais vue du côté
français. En gros, ce fut la même chose. Boue, bombe, bruit et
brouillard. Maintenant pour répondre à ta question, la rencontre
entre ces deux Allemands s'est déroulée 50 ans après le début des
hostilités, soit un demi-siècle et en territoire neutre à Zürich.
Cependant, ces deux vieux messieurs avaient conservé leur point de
vue sur la chose. Pour Remarque, c'était purement et simplement une
boucherie inutile dont on ne revenait pas; pour Jünger, c'était une
épopée fascinante, une héroïque aventure qui l’exaltait encore.
En
somme, dit Lucien l'âne, ce Jünger, il aimait ça...
En
effet... Mais regarde, écoute ma canzone et tu comprendras...
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.
La
mort chevauche un cheval noir,
Son
casque empêche de la voir
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1914,
tout le monde l'a encore en tête
Au
Nouvel-An, on s'était tous congratulés... Quelle fête !
En
août, On s'élança sus à l’ennemi sûrs de sa défaite !
1964,
à Zürich, un fameux tête-à-tête
En
août 1914, quand commença l'effroyable combat
Trop
jeunes, ils n'y étaient pas encore ces deux-là.
Remarque
(Erich Maria) était venu de Locarno
Jünger
(Ernst) arrivait du Würtemberg
Le
premier était infirmier, l'autre un héros
L'un
était d'Osnabrück, l'autre d'Heidelberg
En
août 1914, quand commença l'effroyable combat
Trop
jeunes, ils n'y étaient pas encore ces deux-là.
Deux
fossiles de la Grande Boucherie en colloque singulier
Dans
la galerie de la rôtisserie remémorant le passé
Cinquante
ans après, rencontre de deux écrivains-soldats
À
l'hôtel des Cigognes (Zum Störchen) sur la Limatt, ils étaient là
En
août 1914 , quand commença l'effroyable combat
Trop
jeunes, ils n'y étaient pas encore ces deux-là.
Remarque
parle le premier
De
ces anciens jeunes enrégimentés
Poussés
par leurs professeurs les ados de Saxe ou du Wurtemberg
Ne
sont jamais revenus de Langemarck ou du Katseberg
En
août 1914, quand commença l'effroyable combat
Trop
jeunes, ils n'y étaient pas encore ces deux-là.
En
vérité, un sur deux y sont restés
Les
autres ont été pour toujours marqués.
« La
mort chevauche un cheval noir,
Son
casque empêche de la voir »
En
août 1914, quand commença l'effroyable combat
Trop
jeunes, ils n'y étaient pas encore ces deux-là.
Jünger
enchaîne sur sa fascination militaire
Son
goût pour l'action héroïque et la guerre.
Au
refrain : « C'est la Flandre du mauvais sort,
En
Flandre, chevauche la Mort. »
En
août 1914, quand commença l'effroyable combat
Trop
jeunes, ils n'y étaient pas encore ces deux-là.
À
la fin de cette première conférence,
Les
vieux messieurs avaient vidé deux bouteilles de rouge de France
« Deux
ans et demi plus tard à Langemarck, au Katsberg, sur tout le front,
En
creusant, on trouvait fusils, casques à pointe et ceinturons. »
En
août 1914 , quand commença l'effroyable combat
Trop
jeunes, ils n'y étaient pas encore ces deux-là.