1964
– Un Beau Mariage
Canzone française – Un Beau Mariage – Marco Valdo M.I. – 2012
Histoires
d'Allemagne 65
Au travers du kaléidoscope de Günter Grass. : « Mon Siècle » (Mein Jahrhundert, publié à Göttingen en 1999 –
l'édition française au Seuil à Paris en 1999 également) et de ses traducteurs français : Claude Porcell et Bernard Lortholary.
Au travers du kaléidoscope de Günter Grass. : « Mon Siècle » (Mein Jahrhundert, publié à Göttingen en 1999 –
l'édition française au Seuil à Paris en 1999 également) et de ses traducteurs français : Claude Porcell et Bernard Lortholary.
http://www.antiwarsongs.org/canzone.php?lang=it&id=40759
Mil neuf cent soixante-quatre, à Francfort
Croyez-moi, je m'en souviens encore
|
Ah,
Lucien l'âne mon ami, je t'invite à un mariage. Tu y rencontreras
le marié... Il s'appelle Heiner ; le bébé, ce sera une fille
qui s'appellera Beate... et la mariée. Là, je ne sais pas comment
elle s'appelle... Elle ne le dit pas. C'est elle qui raconte cette
histoire. L'histoire de son mariage et tout ce qui s'ensuit. Ça se
passe en mil neuf cent soixante-quatre, à Francfort ...
Donc,
si je comprends bien, si je lis bien entre les lignes, le bébé est
déjà là... C'est peut-être la cause du mariage...
En
effet, tu lis bien entre les lignes. C'est un mariage un peu
pressé... tellement d'ailleurs que cette circonstance va entraîner,
comme dans une comédie, une série de faits inattendus et
suffisamment burlesques pour être drôles. Sauf que.... On pourrait
comparer cette série de quiproquos en cascade à ce qu'on peut voir
dans les films à l'humour ravageur des frères Marx ou chez Mel
Brooks
[[http://www.youtube.com/watch?v=yOdFTF6xNfk&feature=related]]. À
commencer par un fabuleux retard des mariés... Qui, ainsi doublement
pressés, vont se tromper d'étages et aboutir dans la salle
d'audience d'un tribunal... Oh, pas n'importe quelle salle
d'audience, pas n'importe quel tribunal et dès lors, pas n'importe
quel procès... On est à Francfort en 1964 dans le bâtiment
municipal du Römerberg et on débouche dans la salle du tribunal qui
juge les accusés d'Auschwitz
[[http://www.ina.fr/politique/allocutions-discours/video/CAF93012577/les-bourreaux-et-les-victimes.fr.html]]...Une
plongée dans l'horreur absolue... Je te propose un passage de cette
pièce, intitulée L'Instruction
[[http://www.ina.fr/fictions-et-animations/theatre/video/CPF07011275/l-instruction.fr.html]],
où un des juges est interprété par Pierre Dac.
Et
ensuite, que dit la chanson ?, demande Lucien l'âne.
Tu
sais, Lucien l'âne mon ami, les chansons ne sont pas des
comptes-rendus sténographiques de procès, ni des rapports, ni des
articles documentaires... Elles ont plutôt tendance à procéder par
ellipse... ici, elle dit – la chanson – que la narratrice a
assisté à l'ensemble du procès et qu'elle n'a jamais pu oublier ce
qu'elle y a entendu. Elle n'en dira pas beaucoup plus... Mais il est
une chercheuse française Véronique Chevillon qui s'est intéressée
à ce procès et spécialement, également, aux Sonderkommandos
[[http://www.sonderkommando.info/proces/francfort/accuses/index.html]]
et elle a rassemblé bien des informations à ce sujet. Je lui dédie
cette chanson. En fait, elle a mené – je devrais ajouter elle mène
– ce travail avec la même obstination que celle qui préside aux
Chansons contre la Guerre – afin que l'on sache, afin qu'on
n'oublie jamais.
Oh,
dit Lucien l'âne, on devrait lui faire connaître les chansons de
Dachau Express
[[http://www.antiwarsongs.org/canzone.php?id=8756&lang=it]]
que tu as écrites et qui peut-être pourraient l'intéresser...
Quant à nous, nous allons continuer avec nos Histoires d'Allemagne à
rappeler le devoir de résistance – Ora e sempre : Resitenza !
et à tisser le suaire de ce vieux monde full of song and fury et
cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.
Mil
neuf cent soixante-quatre, à Francfort
Croyez-moi,
je m'en souviens encore
Même
des années plus tard quand on a pris de l'âge
On
se souvient toujours de son mariage.
Pour
un beau mariage, ce fut un beau mariage
Sauf
qu'on avait dû se marier vite fait
J'étais
dans un état intéressant, qu'ils disaient
Il
était temps de constituer notre ménage.
Pour
un beau mariage, ce fut un beau mariage
Sauf
qu'on s'était trompé d'étage.
Ne
croyez pas qu'on l'avait fait exprès
Mais
tous ces escaliers nous ont menés au procès.
Quel
procès ?, je leur ai dit. Qui c'est qu'on juge ici ?
C'est
le procès d'Auschwitz qu'ils m'ont dit.
Ici,
qu'ils nous ont dit, c'est pas le bon endroit
Pour
les mariages, c'est deux étages plus bas
Qui
c'est Auschwitz, que je demandais dans l'escalier
Heiner,
mon mari, a dit : tu venais de naître quand ça s'est passé.
Toujours
en courant, je le relevais ma robe, on voyait l'ourlet
On
est arrivés tout dépareillés, les témoins rigolaient.
Le
lendemain, après la fête, je me demandais
Est-ce
vrai ce qu'on m'a raconté?
Je
voulais savoir vraiment ce qui s'était passé.
Je
voulais voir de mes yeux, entendre ce procès
Dans
mon ventre, il y avait le bébé et je me disais
Si
c'est vrai ce qui s'est passé...
Alors,
j'y suis allée jusqu'au bout et j'ai tout écouté
J'ai
tout entendu et le pire dans ce procès.
À
chaque anniversaire de notre mariage
Comme
par un fait exprès
Rien
à faire, on se trompe d'étage
Et
je le revois tout entier ce procès.
J'entends
toujours ces braves gens qui ne savaient pas compter
J'entends
toujours ces doux assassins qui avaient tout oublié
Je
revois leurs regards voilés et leurs yeux rusés.
J'entends
ces gentils tueurs qui hésitaient à tout avouer.
Mil
neuf cent soixante-quatre, à Francfort
Croyez-moi,
je m'en souviens encore
Même
des années plus tard quand on a pris de l'âge
On
se souvient toujours de son mariage.
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