1951
– Lettre de Marienborn
Canzone française – Lettre de Marienborn – Marco Valdo M.I. – 2011
Histoires d'Allemagne 50
Au travers du kaléidoscope de Günter Grass. : « Mon Siècle » (Mein Jahrhundert, publié à Göttingen en 1999 –
l'édition française au Seuil à Paris en 1999 également) et de ses traducteurs français : Claude Porcell et Bernard Lortholary.
Quand Adolf a promis l'auto populaire
La belle KdF Wagen, la VW Force par la Joie
Quand la ville elle-même fut nommée par Hitler
Stadt des KdF-Wagens : « Ville de l'auto de la "Force par la Joie" »
|
Mil
neuf cent cinquante et un, cette fois, la narratrice, car c'est une
narratrice, une femme d'ouvrier comme l'était Bertha, écrit une
lettre de Marienborn.
C'est
très étrange comme titre, il me rappelle le titre d'un roman de
Robbe-Grillet, à moins que ce ne soit un film de Resnais... je ne
sais plus.
En
fait, ce sont les deux à la fois et ce qui t'en a fait ressouvenir,
ce doit être l'allitération, la cadence, il y a en effet comme une
vague ressemblance avec L'Année Dernière à Marienbad. Cela dit, ça
n'a rien à voir. Comme je te le disais, la narratrice qui porte le
doux prénom d'Elfriede...
J'aimerais
beaucoup, dit Lucien l'âne, sérieux comme dans le film, j'aimerais
beaucoup rencontrer une dame portant le prénom d'Elfriede...
Ça
aussi, ça n'a rien à voir avec la chanson. Mais enfin, tout est
possible... Donc, Elfriede écrit une lettre et pas n'importe quelle
lettre et pas de n'importe où.
De
Marienborn, je sais..., dit Lucien l'âne un peu irrité par tous ces
atermoiements. Quelle importance ?
Mais
précisément... Nous sommes, du moins, la narratrice, Elfriede est
en 1951 et elle vit dans la petite maison qu'elle a héritée de sa
grand-mère dans le village de Marienborn. Marienborn est situé
juste de l'autre côté d'une certaine frontière et dans une «
autre » Allemagne : la Démocratique... alors que son correspondant,
plus exactement, sa correspondante est dans l'autre Allemagne : la
Fédérale. Et cette circonstance a une énorme importance... Elle
est même le thème de la chanson...
De
plus, c'est une lettre de protestation, une lettre de réclamation...
Une lettre qui dénonce certaine discrimination : celle qui frappe
les anciens ouvriers de la fabrique de l'auto populaire qui avaient
cotisé pour cette auto et qui dans ce cas-ci, habitent l'autre
Allemagne. Une lettre à Madame VW
[[http://www.fndirp.asso.fr/Volkswagen.htm]], cette vieille fille
avide, née des œuvres d'Adolf Hitler et de Ferdinand Porsche et qui
s'est vendue des millions de fois et continue à le faire. Depuis
d'ailleurs, bien appuyée sur ses escroqueries de départ : elle
disait qu'elle allait faire des autos populaires... Elle faisait des
amphibies militaires. Elle avait promis une auto à ses ouvriers...
Elle les avait fait cotiser... Elle ne l'a jamais fournie cette auto
populaire à Elfriede... C'est la raison de sa lettre de réclamation.
Pourtant, Elfriede et son mari ont travaillé presque toute leur vie
pour elle... Madame VW, en vraie maquerelle, a même exploité des
esclaves... Faut dire que ces femmes-là étaient Russes et
prisonnières et qu'il fallait servir Hitler.
Et
qu'est-elle devenue cette dame VW depuis le moment de cette Lettre de
Marienborn ? A-t-elle encore prospéré ?
Mais
bien évidemment.... Très exactement cette année, elle est devenue
la plus riche marchande d'autos (et même plus seulement des autos
populaires...) du monde. Elle est en train de la gagner sa guerre,
cette enfant de Porsche et de Hitler.
Tu
as la dent dure, Marco Valdo M.I., avec cette personne... Mais tu as
raison et même tu n'es pas encore assez dur avec ces gens-là. Cette
dame avait une tare dès le départ, dès avant sa naissance, dès sa
conception. Née dans le mensonge, fille de criminels, elle s'est
impliquée dans cette Guerre de Cent Mille Ans que les riches font
aux pauvres pour les exploiter, y compris comme esclaves – quand
c'est possible, pour édifier de plus grandes richesses, pour étendre
leur domination à la planète entière. Face à cette guerre
silencieuse, cette guerre qui ne dit pas son nom, mais qui prolonge
l'autre jusque dans les rues quotidiennes, il nous faut, mon ami
Marco Valdo M.I., de toutes nos faibles forces tisser le linceul de
ce monde vieux, menteur, escroc et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.
Mon homme, il a – et moi aussi – versé tous les mois
À l'association des épargnants de l'auto populaire
On l'avait payée cette auto populaire
On a droit à un exemplaire
|
Madame
VW, pourquoi ne réponds-tu pas ?
Elle
est pourtant près de la frontière ma petite maison
De
l'autre côté du rempart de protection.
Madame
VW, pourquoi ne réponds-tu pas ?
Mon
homme et moi, on a tant travaillé pour toi.
C'est
injuste et mesquin ces tergiversations
Madame
VW, réponds !
Dès
le début déjà, mon homme travaillait chez toi
Quand
Adolf a promis l'auto populaire
La
belle KdF Wagen, la VW Force par la Joie
Quand
la ville elle-même fut nommée par Hitler
Stadt
des KdF-Wagens :« Ville de l'auto de la "Force par la Joie"
»
Kraft
durch Freude – La Force par la Joie, un leurre
Arbeit
macht frei... Le Travail rend libre ... Même tabac.
Il
travaillait chez toi mon homme, quand l'ingénieur
Ferdinand
Porsche a inventé l'auto populaire
Mon
homme, il a – et moi aussi – versé tous les mois
À
l'association des épargnants de l'auto populaire
On
l'avait payée cette auto populaire
On
a droit à un exemplaire
Il
était bleu avant la guerre
Mais
je préfère la couleur tilleul vert.
Et
comme a dit le tribunal, 600 DM moins cher.
Madame
VW, pourquoi ne réponds-tu pas ?
Elle
est pourtant près de la frontière ma petite maison
De
l'autre côté du rempart de protection.
Madame
VW, pourquoi ne réponds-tu pas ?
Mon
homme et moi, on a tant travaillé pour toi.
C'est
injuste et mesquin ces tergiversations
Madame
VW, réponds !
Après
Stalingrad, j'ai travaillé à l'usine
Plus
question d'autos, on faisait des amphibies militaires
C'étaient
de bien belles machines
Que
sont devenues les ouvrières russes prisonnières?
Quand
on nous a débarrassés d'Hitler,
À
Wolfsburg, tout était par terre
Mon
homme a tout déblayé
Et
on a recommencé à en faire.
En
1951, je m'en souviens, on a fêté
La
deux cent cinquante millième auto populaire
Mon
homme est sur la photo de cet anniversaire
Deux
cent cinquante mille autos populaires
Et
même pas une pour nous satisfaire
Mon
homme est allé du comité d'entreprise au cimetière
Et
nous, on n'a toujours pas notre auto populaire
On
habite du mauvais côté de la frontière
Madame
VW, pourquoi ne réponds-tu pas ?
Elle
est pourtant près de la frontière ma petite maison
De
l'autre côté du rempart de protection
Madame
VW, pourquoi ne réponds-tu pas ?
Mon
homme et moi, on a tant travaillé pour toi.
C'est
injuste et mesquin ces tergiversations
Madame
VW, réponds ! Réponds !
Après Stalingrad, j'ai travaillé à l'usine
Plus question d'autos, on faisait des amphibies militaires
C'étaient de bien belles machines
Que sont devenues les ouvrières russes prisonnières?
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